Antoni Lallican, photojournaliste français tué en Ukraine : les premières circonstances de l’attaque ciblée de drone russe
Le photojournaliste Antoni Lallican a perdu la vie près de Kramatorsk dans une frappe délibérée de drone russe. En reportage à ses côtés, son confrère ukrainien Georgiy Ivanchenko a été grièvement blessé. Reporters sans frontières (RSF) publie les premiers éléments de cette attaque ciblée.
C’est près de Komychouvakha, commune de l’est de l’Ukraine au sud-ouest de Kramatorsk, que se trouvaient, le 3 octobre au matin, Antoni Lallican et son confrère ukrainien Georgiy Ivanchenko, deux photoreporters indépendants et familiers des terrains de guerre. Ils accompagnaient la 4e brigade de chars de l’armée pour couvrir la construction de fortifications dans la région.
Menace à vingt kilomètres du front
Située à une vingtaine de kilomètres du front, la zone n’est pas en première ligne mais se trouve de plus en plus sous la menace des drones russes. Selon les informations de RSF, les militaires accompagnant les journalistes ont été informés plusieurs fois de la présence de drones dans la zone, contraignant le groupe à se mettre à l’abri, avant d’en ressortir un peu plus tard. Puis, avant 9h30, un drone russe de type FPV (First Person View) – de petits appareils équipés d’explosifs, et d’une caméra transmettant en direct les images à l’opérateur – survole le groupe avant de frapper. Au moment de l’attaque, les deux photoreporters, équipés de casques et de gilets marqués “Presse”, sont à découvert. Leur voiture est stationnée à plusieurs centaines de mètres.
L’attaque tue Antoni Lallican sur le coup et blesse grièvement Georgiy Ivanchenko. Évacué d’urgence, ce dernier a été amputé d’une jambe et il est, à ce jour, toujours hospitalisé. Trois autres civils étaient aussi présents – pour des travaux de fortification, selon les informations de RSF. Les autorités ukrainiennes ont ouvert le jour même une enquête préliminaire pour crime de guerre, confiée au bureau du procureur régional de la région de Donetsk. Deux jours plus tard, le 5 octobre, le parquet national antiterroriste français (PNAT) a annoncé à son tour l’ouverture d’une enquête gérée par l’Office central de lutte contre les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre.
“Tuer des journalistes, pourtant protégés par le droit international, est un crime de guerre. Cette attaque délibérée, selon les informations recueillies par RSF, a coûté la vie à Antoni Lallican, photojournaliste indépendant reconnu pour son travail, et condamné son confrère Georgiy Ivanchenko à vivre avec des blessures irréversibles. Les enquêtes ouvertes en France et en Ukraine doivent établir toutes les responsabilités et identifier les auteurs de cette frappe. Depuis l’offensive massive de 2022 menée par le Kremlin contre son voisin, quatorze reporters ont été tués en Ukraine. Ces crimes doivent cesser ».
Thibaut Bruttin
Directeur général de RSF